Le « bon » pouvoir d’achat
"Augmenter le pouvoir d'achat ne doit pas se faire à n'importe quel prix. Respecter les consommateurs ne doit pas empêcher de protéger les producteurs et leurs marges, ainsi que la planète", rappelle Cédric Dufour, PDG de Rakuten France et Rakuten TV. "Les notions de revenu disponible, d'inflation et de prix sont bien sûr centrales pour répondre à des besoins immédiats, mais cette approche strictement quantitative occulte une dimension fondamentale : celle de la qualité."
Le juste prix
"Le « bon » pouvoir d'achat ne saurait être obtenu à n'importe quel prix. Il doit être soutenable et partenarial. Proposer des tarifs « discountés » est louable, mais s'il s'agit pour cela de comprimer les marges d'une manière insoutenable pour certains acteurs de la chaîne, cela n'a aucun sens, car cela n'est pas économiquement tenable.
Une autre approche, adoptée par certaines plateformes d'e-commerce, est possible : proposer un «juste prix », en réduisant au minimum les coûts d'intermédiation, mais en assurant une juste répartition de la valeur entre tous les acteurs économiques. Grâce à cette logique, les commerçants et les marques peuvent accéder, dans des conditions équitables, aux consommateurs. Prenons l'exemple du Black Friday , un rituel souvent décrié, mais qui apporte beaucoup au pouvoir d'achat, en permettant de faire ses courses de Noël au meilleur prix. Souvent, les promotions sont le fruit d'une démarche collective de toute la chaîne amont, où chacun fait un effort. Ainsi, lorsque le distributeur offre du « cashback », il investit lui-même pour le pouvoir d'achat, en réduisant sa marge pour baisser le prix réel. L'effort est ainsi réparti pour baisser le prix et faire que la vente ait lieu, sans écraser la marge du vendeur. Certains consommateurs peuvent ainsi acheter des produits qui leur seraient autrement inaccessibles. Tout le monde y trouve son compte : en premier lieu les consommateurs et les marques, mais aussi sur le long terme les distributeurs, malgré les nombreuses promotions consenties."
Circularité et seconde main
"Le bon pouvoir d'achat repose également sur une économie de plus en plus circulaire. L'augmentation régulière de la seconde main à laquelle nous assistons, nous l'avons encore vu avec la revente des cadeaux de Noël, est positive pour l'environnement. On ne fait que se transmettre les biens, sans faire payer à la planète, à chaque fois, le prix fort du neuf. Mais elle est aussi positive pour le portefeuille : toutes les ventes de seconde main sont en réalité du pouvoir d'achat partagé et collectif, qui permet d'acheter les choses dont on a besoin à un prix plus avantageux, et donc de mieux respecter son budget. C'est du gagnant-gagnant qu'il faut absolument encourager."
La qualité, gage de durabilité
"Le bon pouvoir d'achat, c'est enfin, et c'est le plus important, respecter le consommateur. L'achat neuf, comme l'achat d'occasion, ne doivent pas être des achats au rabais, au mépris des garanties les plus élémentaires. Malheureusement, le « low cost » est trop souvent un achat de basse qualité. Ce qui, au-delà des questions les plus élémentaires de sécurité des produits et de respect des droits humains lors des étapes de fabrication, est contreproductif, car il pousse au rachat. Acheter de meilleure qualité revient en effet à acheter moins régulièrement, car les produits durent plus longtemps. Tout achat doit également s'accompagner de possibilités de remboursement ou d'échange, de sécurité pour les transactions et d'un engagement contre la fraude et la contrefaçon.
C'est un vrai défi pour les plateformes de commerce électronique, mais ne les mettons pas toutes dans le même sac. Si certains acteurs extra-européens s'affranchissent des lois, de certaines réglementations et des contraintes fiscales, de très nombreuses plateformes européennes promeuvent un modèle de confiance. Gageons que les consommateurs ne s'y tromperont pas.
Le bon pouvoir d'achat, ce n'est donc pas seulement acheter plus, mais acheter mieux. Il repose sur une répartition équitable de la valeur au sein des chaînes économiques, et une prise en compte des enjeux environnementaux et de qualité. C'est bien plus qu'une question économique. C'est une pressante question de société." estime Cédric Dufour, PDG de Rakuten France et Rakuten TV.
Par Cédric Dufour , PDG de Rakuten France et Rakuten TV
Source : Tribune parue dans les Échos.